106 – Petit interlude cosmologique

Le titre de ce blog montre que j’ai fait une carrière en astronomie. Son en-tête indique que j’ai écrit un livre sur la thermodynamique. La plupart de mes billets portent sur la biologie et les sciences humaines, très peu sur l’astronomie. Pour ceux d’entre-vous qui s’intéressent à cette dernière discipline, l’allégorie du billet précédent ne vous rappelle rien? Ce coup de feu suivi de l’expansion rapide d’un troupeau de chevaux ne vous rappellent-ils pas le Big Bang et l’expansion de l’univers?

Dans mon billet précédent, il symbolisait l’étincelle qui déclenche le mouvement du piston dans un moteur à explosions. On sait que ce mouvement de détente des gaz est suivi d’une phase d’expulsion des gaz brulés puis d’une phase de compression de gaz frais. En serait-il de même pour l’univers?

On sait aujourd’hui que l’expansion de l’univers s’accélère. Cela implique que les galaxies dont la vitesse de récession est proche de la vitesse de la lumière vont un jour devenir inobservables. Tel qu’on l’observe, l’univers expulse bien de la matière au fur et à mesure qu’il se détend. En thermodynamique, on sait que lorsqu’un gaz se détend, il se refroidit. Aujourd’hui, la température de l’univers n’est plus que de 3° Kelvin.

Peut-être avez-vous encore un baromètre à la maison? Il se peut que la pression atmosphérique ait baissé et vous vous dites: «il va sans doute pleuvoir ou même neiger». Lorsque la température de l’atmosphère diminue, l’humidité de l’air se condense en eau ou même en glace. De même, lorsque l’univers se refroidit, sa matière se condense en galaxies, puis celles-ci se condensent en étoiles. Ainsi, comme un moteur à explosion, notre univers expulse de la matière tandis qu’il en condense une autre.

En thermodynamique, lorsqu’un gaz se condense, il se réchauffe. Dans le cas des étoiles, le gaz se réchauffe suffisamment pour déclencher des réactions thermonucléaires. Plus les étoiles formées sont grosses, plus leur durée de vie est courte. Les plus grosses explosent. La matière se détend à nouveau pour se recondenser plus tard. On sait que les galaxies elles-mêmes se condensent pour former des trous noirs. Certains théoriciens, comme Lee Smolin, pensent que les trous noirs explosent un jour pour créer de nouveaux univers.

On sait que dans un cycle idéal de Carnot, l’entropie de la source chaude est transférée à la source froide. On sait aussi que l’entropie d’un trou noir est proportionnelle à sa surface. Au fur et à mesure qu’un trou noir accrète de la matière, sa surface augmente, donc son entropie aussi. Si l’univers décrit des cycles de Carnot, le Big Bang en est la source chaude, et les trous noirs en sont la source froide. Vu ainsi, l’univers serait une immense machine à dissiper l’énergie.


10 réflexions sur « 106 – Petit interlude cosmologique »

  1. L’approche réductionniste a puissamment contribué à la connaissance des faits et permis une reconstitution temporelle de leur enchaînement .Mon histoire commence avec l’énergie fabuleuse libérée dans l’espace il y a quinze milliards d’années et le souvenir un peu flou de la naissance de milliards de galaxies se précise à partir de la naissance ,Il y’a quatre milliards de cela,de notre bonne terre orbitant autour de l’énergie créatrice de son astre solaire.Depuis le début elle ne cesse de fonctionner comme une gigantesque machine thermique évacuant son excès de chaleur ,pour se créer une première croute solide ,puis liquide ensuite gazeuse et organique.Au moment où je vous parle elle me semble encore fonctionner sur le même principe en évacuant sa haute température interne par le volcanisme ,destructeur et créateur et en modelant son relief par la tectonique des plaques .L’énergie nécessaire à la vie est fournie par le soleil et nous sommes en voie de l’utiliser rationnellement après deux siècles de pillage du stockage fossile sagement accumulé par Gaia depuis des milliards d’années .Notre espèce appartient au règne des primates âgé de quelques millions ,sapiens ne date que d’une centaine de millier et la naissance de civilisations est toute récente.Celles ci se sont succédé à un rythme de millier d’années et l’actuelle est née seulement depuis quelques siècles.Nous vivons dans une société d’abondance et jouissons de confort de vie impensable par la génération précédente.L’homme a marché sur la lune pour la première fois il y a cinq dizaines d’ans.La révolution informatique à pris le relai de l’agricole dix milliers en arrière et industrielle vieille de trois siècles.Il n’est pas étonnant que nous soyons dépassés par les événements si nous conservons les systèmes de pensée du début de notre ère .
    Vivre en société de milliards d’individus désormais conscients d’avoir un habitat en forme de sphère flottant dans l’espace nous oblige à changer nos lois de clans ou de nations rivales.Le partage basé sur la notion de propriété ,sur la rétribution d’un travail qui peut être fait en grande partie par des robots,n’est plus viable à très court terme.Il nous faut rapidement évoluer de l’économie de marché encore en vigueur à une » économie planétaire  » de répartition et de mise en valeur pour le bien vivre collectif.Quelques détenteurs de très grosses richesses commencent à se rendre compte que le système financier est une erreur qui sera inévitablement sanctionné par les lois de l’évolution sélective.
    Comment vivre l’esprit tranquille et l’âme en paix en toute honnêteté intellectuelle ?Confucius proposait de conserver le nez au sol pour ne pas perdre de vue la réalité du monde dans lequel il vivait et aussi de lever le regard vers le ciel pour ne pas oublier l’ensemble.La difficulté étant de de ne pas lever le nez trop haut pour ne pas risquer de s’envoler mais juste assez pour se sentir en harmonie.

  2. Je ne dirais pas que le système financier est une erreur, après tout il a contribué à augmenter de manière significative notre dissipation d’énergie, ce qui est la suite logique dans l’évolution de l’Univers.

    D’un point de vue moral, par contre, vous avez sans doute raison vu les dérives qui y sont associées…

  3. Bonjour M.Roddier,

    merci pour ce billet astronomiquement pertinent.
    J’aimerais savoir si quelques théoriciens se sont aventurés à postuler/déterminer que le mécanisme thermodynamique en jeux actuellement : l’univers en expansion se refroidit, sa matière se condense en galaxies, puis celles-ci se condensent en étoiles, doit pouvoir décrire les tout premiers instants de l’univers (au temps de Planck) ou l’univers en inflation se refroidit en se condensant et créant les particules élémentaires, puis les particules composées ? Une théorie qui combinerait MaxEnt et théorie des champs quantiques ?

  4. Bonjour

    Vous dites ceci:
    « En thermodynamique, lorsqu’un gaz se condense, il se réchauffe. »

    Ne serait-ce pas lorsqu’un gaz se comprime, il se réchauffe?
    La compression qui est l’inverse de la détende.

    Une autre allégorie dans laquelle la source chaude devient la source froide pour un recyclage parfait

    Atmosphère, plante, sol, système de recyclage parfait.

    En considérant le fruit de la plante comme l’énergie utile, où donc se situe la source froide ?
    Elle se situe dans sa ramure qui évapo-transpire l’eau en revenant sous forme de pluie nécessaire au sol et à la plante http://agriculture-de-conservation.com/L-EAU-LE-SOL-LES-PLANTES-UNE-AUTRE-THEORIE-DU-CHANGEMENT-CLIMATIQUE.html , ses racines qui rejettent des exsudats hydrocarbonés et en fin de cycles annuels par la décomposition de sa ramure et ses racines.
    Où vont donc tous ces éléments ?
    Ils constituent la source chaude pour l’ensemble de tous les organismes du sol qui eux aussi doivent rejeter dans une source froide qui n’est rien d’autre que le rejet du CO2 dans l’atmosphère, la production d’humus et la minéralisation pour les plantes. Le rejet du CO2, l’humus produit, la minéralisation, l’eau, et l’énergie solaire deviennent la source chaude pour la plante. Dès lors on voit bien que le système est un recyclage parfait dans lequel il n’y a pas de fuite et on voit aussi la nécessité de couvrir le sol avec les ramures des plantes en fin de cycle qu’il soit naturel par le gel ou provoqué par un outil.
    Pour que le recyclage soit complet il ne faut pas oublier les excréments et les cadavres, mais cela est une autre histoire.

  5. Bonjour,dans le cadre de la théorie de la gravité quantique on considère que trou noir et trou blanc sont en faite les deux faces d’un même phénomène.
    De ce point de vu il serait intéressant de reconsidérer la notion de temps,puisque la fin du temps pour un univers serait le début pour un autre.
    H.Bloom à proposer un modèle (Big bagel) combinant ses deux notions.
    Et il y a bien évidemment Lee Smolin que vous citez dans votre ouvrage.
    Stephen Hawking(entre autres) défends quant à lui l’idée que les trous noirs conserveraient de l’information à leurs surface,il n’y a qu’un pas pour pensez que cette information serait transmise à un autre univers.On ne peut s’empêcher d’y voir un parallèle avec l’évolutionnisme,qui serait ici cosmologique.

  6. F. RODDIER : « Le titre de ce blog montre que j’ai fait une carrière en astronomie. Son en-tête indique que j’ai écrit un livre sur la thermodynamique. » Et la locomotive, qu’expose-t-elle ?

    https://lh4.googleusercontent.com/-ez4rqe8RQwg/WH_889jwWRI/AAAAAAAAAew/zbjk0Cq4enE1owlthwrujYctUhGhM1wvACL0B/w897-h673-no/La%2Bdure%25CC%2581e%2Bpoignarde%25CC%2581e.jpg

    (La Duré poignardée : actuellement MAGRITTE, LA TRAHISON DES IMAGES, jusqu’au 23 janvier, au Centre Pompidou)
    Note jointe à l’œuvre : « Juxtaposant une locomotive et une cheminée, Magritte nous invite à rapprocher, voire à confondre, deux objets qui émettent des panaches de fumée. C’est un principe d’équivalence entre cheminée et locomotive que nous propose La Duré poignardée. Foyer et locomotive doivent leur raison d’être au feu qu’elles ont vocation à héberger. Ce principe de similitude fait de la cheminée le double de la locomotive. Elle devient l’agent par lequel la maison est propulsée, à toute vapeur, dans les plaines de la poésie et de l’imaginaire. » .

    Cependant, nous pouvons constater que la cheminée de cet intérieur bourgeois est condamnée : l’âtre est occulté et empêche toute possibilité de « refoulement » de l’engin. L’irruption de cette machine froide, noire et figée au cœur même du salon, provoque un réel sentiment de malaise. Car cette locomotive exprime avant tout la modernité. Modernité du temps et de l’espace humains à l’aune de la technique qui, selon Christophe Genin, « n’est plus la somme des moyens à la disposition des fins humaines, mais devient une dimension de l’efficacité qui, devenant une fin en soi, impose son rythme et son ordre à l’homme. La locomotive représente cette vitesse qui dépasse l’homme, cette machine qui l’aliène, cet ailleurs qui le hante, cette modernité qui le travaille. Elle est d’ailleurs l’héroïne de La Bête Humaine de Jean Renoir, film sorti l’année même où Magritte peignit La durée poignardée. » (1938)

    Notre étonnement ne doit donc pas s’arrêter à cette métamorphose trop visible, juxtaposant une locomotive et une cheminée, qui étouffe le mystère de La Duré poignardée. Enfin, d’autres éléments apparaissent : une pendule, un miroir, deux chandeliers… Quel est le rapport entre ces objets et cette locomotive à la conquête de l’espace…

    L’ espace-temps thermodynamique ?

    Entretien avec Ilya Prigogine, Andrew Gerzso, Centre Georges-Pompidou 1995 : http://articles.ircam.fr/textes/Gerzso95a/

    Extrait : « Magritte, tout comme Einstein, insiste sur le fait que le créativité vient de l’étonnement, d’un sentiment de malaise. Mais pour lui, toute tentative d’explication du mystère dégrade le mystère. Il faut le prendre comme un tout. Chez Einstein aussi, l’étonnement est le point de départ et la créativité la réponse. Il y a dans les deux cas un sentiment du mystère de l’univers. Mais la réponse est différente. Pour Einstein, ce mystère doit être analysé. La théorie de la relativité générale due à Einstein est basée sur le fait que la masse inerte est égale à la masse gravifique. C’était un fait connu depuis Galilée (tous les corps tombent avec la même vitesse dans le vide) et qui a abouti à la mécanique classique de Newton. Ce fut pour Einstein le point de départ de l’une des plus belles constructions intellectuelles de l’histoire. En prenant l’exemple de Magritte et celui d’Einstein, je veux souligner la variété des attitudes que l’on trouve devant le phénomène de la créativité. »

  7. Vous avez raison je n’aurais pas dû employer le mot erreur pour qualifier le système financier mais plus correctement me référer au chapitre 13 paragraphe 13.5 Thermodynamique et sciences sociales de Francois Roddier dans lequel il souligne que le phénomène de condensation au »point critique » la monnaie se concentre sur un nombre d’individus de plus en plus réduit.C’est ce qu’a constaté le dernier congrès de Davos: les 8 personnes les plus riches du monde concentrent dans leurs mains autant que la moitié la plus pauvre de l’humanité (3,7 milliards).Ceci conditionne l’évolution de notre espèce humaine et la sélection naturelle sanctionnera en favorisant la vie intelligente.Chacun de nous individuellement peut se demander si le fonctionnement actuel est satisfaisant.Dans le même chapitre l’auteur souligne que le phénomène de condensation n’est pas limité à la monnaie mais s’applique aussi aux richesses culturelles et nous constatons effectivement que ceux qui savent accumulent l’information alors que l’analphabétisme se répand et ainsi s’accroissent les inégalités. »Nous avons dépassé depuis longtemps l’état critique ou la production d’énergie libre est optimale » .Le constat peu satisfaisant encouragerait à revoir notre économie de marché actuelle en l’orientant vers une » économie de vie ».

  8. « Aujourd’hui, la température de l’univers n’est plus que de 3° Kelvin. »
    J’imagine bien que ce n’est pas tout à fait comparable— rigueur scientifique oblige —néanmoins, si notre univers continue globalement de se refroidir, ne pourrait-il pas finir par imploser sur lui-même, comme une simple bulle de savon en train de geler ?
    https://youtu.be/PDQNBnFqzKc

Les commentaires sont fermés.